La guerre des barrages a bien lieu. Liliane Held-Khawam

Grande Dixence

Lac du barrage de la Grande Dixence-Photo de Karin Baumanna

Ce que les lobbies veulent, la Commission européenne de Bruxelles veut! Et que désirent actuellement les lobbies? Les barrages. Tous les barrages, notamment les français et les suisses.

Dans le cas de la France, les barrages appartiennent à 100% à l’Etat et seules les concessions hydrauliques sont confiées à EDF/GDF dans un rapport de 80% pour EDF et 20% pour GDF Suez

Cet état de fait français ne convient pas à Bruxelles et ses bataillons de lobbies. Bruxelles a mis récemment la France en demeure. Un article du Figaro est très clair à ce sujet:

« La Commission européenne somme Paris de libéraliser les concessions hydroélectriques. »

Le journal ajoute un peu plus loin:

« Selon une source proche du dossier, la Commission européenne serait même encline à demander à EDF de ne pas se porter candidat dans le cadre des appels d’offres qui seraient lancés.« 

EDF doit faire  place notamment à l’italien Enel, l’allemand E.ON  ou le norvégien Statkraft. EDF a donc un besoin urgent d’avaler à son tour plus faible que lui pour consolider son assise renouvelée suite à une amputation programmée. Les barrages et concessions hydrauliques suisses rachetés à bon compte feraient si bien l’affaire!

Ça tombe bien Alpiq va mal. Il se trouve par ailleurs qu’Alpiq est aussi copropriétaire de la plupart des barrages valaisans. Et selon sa directrice générale, citoyenne allemande, il serait bon d’en vendre la moitié pour réduire les dettes.

Des barrages suisses sont à vendre au moment même de la mise sous pression de Bruxelles sur la France. Un timing parfait!

L’affaire pourrait être excellente pour EDF, deuxième actionnaire d’Alpiq (25%) derrière EOS qui a toute latitude pour surveiller tout ceci de l’intérieur grâce à une importante délégation franco-allemande au sein du conseil d’administration de l’entreprise.

Déjà en avril 2013, le journaliste Willy Boder relevait dans le Temps dans un article intitulé « Alpiq sous la pression du français EDF » la « présence d’un actionnaire très remuant » en parlant de EDF. Il y relatait aussi les propos d’un proche du dossier:

«EDF ne poursuit pas les mêmes buts que les propriétaires suisses d’Alpiq, confie une source proche du dossier. Le groupe français a créé de fortes tensions internes l’an dernier en exigeant la vente massive d’actifs, y compris des biens suisses, comme des barrages valaisans, au cœur même de l’activité de production d’Alpiq.»

Dans une logique de « eat or be eaten » (manger ou être mangé) d’une part et d’une faiblesse voire déliquescence impressionnante de L’État suisse, ce serait le soulagement à Bruxelles. Des européens investiraient dans les barrages français et les français reprendraient les ouvrages suisses. Tout irait bien dans le meilleur des mondes.

Le peuple suisse est selon toute vraisemblance en train de se faire rouler dans la farine une fois de plus. Le citoyen dont les impôts ont financé ces grands ouvrages hydrauliques découvre qu’ils sont devenus entre-temps propriété privée de sociétés anonymes en passe d’être vendus à de potentiels acquéreurs étrangers. Tout cela pour éponger des dettes dues à une stratégie mimétique et aveugle.

Mai au-delà de la partie financière pure et dure, des questions de fonds doivent être posées. Quid de l’indépendance énergétique? Quid aussi de l’eau potable retenue par ces mêmes barrages? Quid des conséquences au niveau de la répercussion sur les prix de vente de l’électricité mais peut-être aussi de l’eau? L’ampleur des conséquences de ce pillage est inconnue à l’heure actuelle.

Tout Suisse doit penser au fait que le pays détient 8% de l’eau potable de l’Europe et que cela représente un enjeu de taille dans un contexte de sécheresse persistante dans bon nombre de pays. Il faut se battre pour ne pas perdre la maîtrise de la gestion de l’eau!

Liliane Held-Khawam

12 réflexions sur “La guerre des barrages a bien lieu. Liliane Held-Khawam

  1. Bonsoir,
    Nous vivons avec un nuage noir de dettes au dessus de nos têtes, qui pour l’instant nous laisse passer de la lumière..

    Le but de toutes ces opérations sera de créer de la liquidité par tous les moyens possible pour créer l’illusion d’une circulation de la monnaie.

    Quitte à ruiner à court terme des choix de vie et de société.

    Tout va y passer !

    Ce n’est qu’un début.

    Lorsqu’on voit ce jour la défiance des marchés, spx et dax de concert, la messe est dite.

    Encore merci pour cet article pas assez lu..

    Jean SEGUR

  2. Je suis triste de voir tout ce qui ne va pas dans ce monde et de savoir que tout va changer en pire. J’ai peur, tout ce pognon et pouvoir dans les mains de mauvaises personnes qui se foutent complètement des habitants qui subissent les conséquences de leurs petits jeux minables. Grrrrrrrrrr je suis anéantie,trop de choses qui ne vont pas et pas assez de temps pour avoir l’espoir de les voir s’améliorer. Peace and love

  3. Les entreprises électriques étaient en mains publiques pour les protéger des magouilles des requins qui avancent cachés en eau trouble.

    Nous avons remplacé les propriétaires terriens dans les administrations communales par des types sans terre, avide d’argent, de pouvoir et de renommée.

    Certaines communes de plus en plus colonisées par ces requins ont privatisé leurs sociétés publiques pour enrichir ces quelques uns gros poissons et le stratagème pour garder tranquille le bon peuple de mougeons (moutons pigeons ) était de distribuer les parts de société aux propriétaires initiaux, soit les communes.

    Le problème, il suffit que la majorité de l’assemblée des actionnaires et des lobbyistes de tout poil sèment leur poison en tentant l’augmentation de capital au profit d’un seul des actionnaires pour réaliser le hold-up.

    Temps que l’argent coulait à flots, les mougeons ne se sont pas inquiétés…

    Tout à coup les suisses se réveillent.
    Va t’on céder la garantie d’autonomie énergétique de nos barrages à des pays tiers ?

    Ou autrement posé, la Suisse officielle préfère t’elle abdiquer et renoncer à son autonomie ou va t’elle enfin se réveiller et reprendre avec fermeté les commandes de son pays ?
    Nous sommes le château d’eau de l’Europe, pour combien de temps encore?

    Que la Suisse reporte les achats secondaires et qu’elle se concentre sur la préservation de son autonomie énergétique et sur son capital aquatique…

    Une piste pour sauver les barrages suisses, appliquer enfin la taxe sur le CO2, pour taxer l’achat d’énergie électrique issue de la combustion d’énergie fossile.

    Nous, consommateurs lambda, cela ne changera rien, nous payons toujours 20 à 22ct le kWh, que nos services électriques privés de public achète l’énergie à 4ct d’€ le kwh en Allemagne ou qu’il l’achète à 12ct de CHF le kWh aux forces motrices ou aux centrales atomiques suisses.

    Quand on sait que la majorité des suisses ne savent pas combien leur coûte leur facture d’électricité annuelle, on peut se rendre compte ce qu’économise, les entreprises qui consomment beaucoup, qui achète l’énergie charbonnière allemande à vil prix et qui font porter à l’ensemble de la population suisse leur propre irresponsabilité…

  4. Pingback: Nationalisons les barrages suisses! Liliane Held-Khawam – Le blog de Liliane Held-Khawam

  5. « Tout Suisse doit penser au fait que le pays détient 8% de l’eau potable de l’Europe  » ! Vous avez touche exactement là où ça fait mal ! Le gouvernement suisse, incapable d’une moindre vision, ne serait-ce qu’à moyen terme, va bien évidemment laisser faire, pour émettre ainsi « un signal positif envers Bruxelles ». Comme si un sourire niais envers la commission non-élue de technocrates européens était plus important que le bien de son propre peuple !

  6. Pingback: Les pertes d’Alpiq seraient dues à la production. Vraiment? Liliane Held-Khawam – Le blog de Liliane Held-Khawam

  7. Pingback: Les pertes d’Alpiq seraient dues à la production. Vraiment? - LEP et LFE référendum

Laisser un commentaire