La trahison de la Bundesbank. Par bruno Bertez

Une mise au point sur notre analyse et notre critique de la politique allemande. Nous étions très pro-allemand, nous sommes ensuite devenus plus nuancés, maintenant nous sommes anti-allemand.

Dire, « les Allemands », est une facilité de langage abusive, il n’y a pas, sous l’aspect économique et financiers, une position Allemande, mais des positions Allemandes. Il y a les positions politiques, les positions de l’Institution monétaire, la Bundesbank et il y a le peuple. Merkel n’est pas Schauble, le Gouvernement n’est pas la Bundesbank , le peuple est encore une autre catégorie.

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Nous n’avons jamais apprécié Merkel et sa roublardise. Nous avons en revanche apprécié la Bundesbank considérant qu’elle nous protégeait contre les politiciens. Une banque centrale orthodoxe empêche la tyrannie et l’impérialisme. Cela semble paradoxal, mais c’est une vérité que l’on peut peut qualifier d’expérience quand on voit le rôle que joue la Fed dans le financement de l’impérialisme américain. Et le rôle qu’a joué la BCE dans la mise au pas de Syriza.

L’Union Monétaire a été bâtie, comme tout ce que fait l’Europe par marchandages. Or un marchandage fait peut-être ressortir un optimum politique, il ne produit pas un optimum économique et financier, encore moins monétaire. Un marchandage produit des moutons à cinq pattes, des monstres. Et le monstre malgré des gênes Allemands a mal vieilli ; il boite, il devient pervers. L’Union monétaire cesse d’être une construction techniquement viable, elle dysfonctionne, elle consomme, elle s’alimente de plus en plus de politique. L’Union est peu à peu mise sous la tutelle de la politique de la pire espèce, celle de la démagogie d’une part et d e la volonté de domination d’autre part. . Le modèle initial que constituait la BUBA a été détruit. Victoire de la politique sur le technique. Victoire de la tendance à la domination sur la vraie coopération. La BCE est devenue un instrument de l’impérialisme allemand comme la Banque Nationale gérée par le Docteur Schacht l’a été pour Hitler.

Au fil du temps, nous avons développé une analyse critique des positions Allemandes. Nous sommes partis d’un soutien, pour arriver à une franche hostilité. C’est qu’entre temps, la situation a évolué considérablement depuis 2004 époque de notre soutien inconditionnel, à 2012 début de notre hostilité.

En 2004, l’excellent Otmar Issing se dressait magistralement contre la politique de la Fed et livrait une analyse prémonitoire de tout ce qui allait se passer par la suite. Il est loin te temps ou Issing, face aux erreurs impériales de Greenspan qui poussait les feux de la croissance par le crédit et la bulle du logement, il est loin ce temps ou Issing osait pointer le risque de chute des valeurs boursières, l’expansion incontrôlée du crédit, stigmatiser la fabrication de bulles et proclamer que les Banques centrales avaient la responsabilité d’agir de façon préventive. Les Banques Centrales sont devenues pyromanes.

Seul Weidmann, méritait encore d’être ce que l’on appelle un Banquier Central . Les autres, tous les autres sont des apprentis sorciers, des guignols, de médiocres politiciens qui conduisent le Système d’abord à la dislocation et ensuite à la ruine. Ces faux prophètes croient à la toute puissance de leurs manipulations monétaires, aux créations de liquidités, aux effets de richesses, aux taux d’intérêts réels nuls, aux guidances et bien sur, aux promesses. « Nous ne laisserons jamais la liquidité se resserrer, nous agirons pour empêcher tout resserrement de la liquidité » a encore déclaré Draghi il y a quelques jours , ce qui se traduit, « nous ne laisserons pas l’appétit pour le risque/jeu, se réduire, nous empêcherons les marchés de corriger ».

Du coup l’euro a repris sa tendance baissière. Ces banquiers Centraux sont devenus les otages des Marchés, désormais, il n’y a plus qu’un sens, le gonflement. Toute correction est impossible tant la fragilité du système est maintenant structurelle, enracinée.

Quand la BCE a suivi la ligne anglo-saxonne de l’inflationnisme, les responsables Allemands ont démissionné de leurs postes européens. C’est tout un symbole, il fallait rester et se battre. Le reste, c’est de la petite histoire, car, alors, tout était écrit : l’OPA de Draghi sur la Banque Centrale, le coup d’état du « coûte que coûte » pour sauver l’Euro tout en le détruisant, la pratique des bail-outs par l’accroissement des dettes que tout le monde sait irrécupérables, et bien sur la tragédie Grecque. La tragédie grecque va déboucher sur 90 milliards de dettes de plus, de dettes monétisées. C’est la victoire terrible du « extend and pretend »qui est la mantra des inflationnistes.

L’inflationnisme avons nous écrit, c’est comme un pucelage : on n’est jamais pucelle à moitié, quand on commence c’est tout ou rien. L’une des lois qui régit l’inflationnisme, c’est celle de l’engrenage. Son moteur c’est la lâcheté laquelle a pour alibi la fragilité. On ne peut jamais dire « stop », car on a peur que le château de cartes ne s’écroule. Les bail-outs par octroi de nouveaux crédits, c’est de l’inflationnisme, même si on fait semblant de croire aux possibilités de remboursement et de services des dettes par l’austérité. Cela, c’est politique ; économiquement on sait que c’est de l’attrape nigaud, de la poudre aux yeux. On sait que c’est l’escalade dans le laxisme et le mensonge et que c’est la pente sur la destruction de la monnaie.

D’abord on inflate pour éviter la faillite, ensuite on inflate pour « rouler » les dettes, enfin on inflate pour payer les intérêts et finalement pour faire semblant de rembourser. Ce que l’on a sous les yeux avec la Grèce est un cas d’école.

L’inflationnisme produit une pensée fausse.

C’est une constante. Ainsi la question que pose la situation de la Grèce en Europe est la suivante : comment un si petit pays, avec si peu de ressources a-t-il pu et peut-il encore accumuler autant de dettes ? La réponse est : parce que la finance est détraquée, parce qu’elle est fondamentalement malsaine, parce que le Système est maintenant d’une fragilité extrême, on a peur qu’il ne puisse résister au moindre choc. Donc, on continue. Au lieu de cette réponse de bon sens, ce que l’on entend c’est l’imbécillité : parce que les grecs ne sont pas sérieux, parce que ce sont corrompus, parce qu’ils ne paient pas leurs impôts etc.

Nous sommes pour la pratique du Central Banking orthodoxe. Nous sommes contre l’inflationnisme et contre la confusion entre et le monétaire et le fiscal. C’était la position des élites Allemandes, c’était celle de la Buba dans le passé. Elles n’auraient jamais du accepter de cautionner la position du gouvernement dans sa volonté de continuer le « extend and pretend » grec. Il fallait réclamer l’opération Vérité, celle qui reconnaissait que l’on ne peut reconstruire sur de fausses valeurs. Les fausses valeurs sont celles du plus fort; par construction et définition, c’est lui qui impose les fausses équivalences.

Nous sommes contre l’inflationnisme parce que lorsqu’on commence l’inflation, on ne sait jamais ou et quand cela s’arrête . L’inflationnisme de la monnaie et du crédit est une drogue, c’ est un tout ou rien. L’inflation demande toujours plus d’inflation que ce soit dans le domaine des biens et services ou dans le domaine des actifs financiers. Quand on commence on ne peut plus s’arrêter.

Nous sommes contre la confusion entre le monétaire et le fiscal, car cela détruit les sociétés. Sur le fiscal on vote , il y a un semblant de démocratie,sur le monétaire on trompe, on vole, c’est institutionnaliser le mensonge comme mode de gouvernement.La confusion entre le monétaire et le fiscal est le mode gestion de la sociale-démocratie laquelle distribue aux uns sans oser en prendre la contrepartie aux autres. La confusion entre le monétaire et le fiscal, c’est le règne par la lâcheté, la destruction de l’honnêteté comme valeur sociale et politique.

Le Central Banking orthodoxe a à voir avec la Vérité, avec la rigueur de pensée, avec l’efficacité. Car, toute la science le montre, seule la vérité est efficace. Ce n’est ni en prétendant que la terre est plate que l’on conquiert l’espace, ni en niant la loi de la gravitation, non c’est en reconnaissant que la terre est ronde et en admettant la pesanteur.

Il n’y avait plus qu’un îlot pour tenter de faire respecter ces pratiques orthodoxes du Central Banking ; c’était la Bundesbank et son chef, Weidmann. La Bundesbank était reste arque boutée contre l’inflationnisme généralisé qui a saisi tous les Banquiers Centraux. Elle refusait de changer de culture, d’analyse et elle maintenait le cap de la rigueur de pensée. C’était un rempart, contre l’arbitraire et la volonté de puissance des politiciens. Mais la Bundesbank ne gère plus que le ministère de la parole, elle n’a de pouvoir que le tribunitien. Or elle a été étrangement très silencieuse ces dernières semaines.

Si on analyse la pratique concrète, pas subjective de la BUBA, on voit que d’un côté elle maintient une ligne, de l’autre elle ratifie, elle participe. C’est l’hommage de la vertu au vice. Elle avale les couleuvres et ce faisant, elle autorise les dérives de Draghi et la volonté de puissance, l’arbitraire Allemands. Elle maintient l’illusion que l’on n’ira pas jusqu’au bout, qu’il y a des limites. Bref elle rend « efficace » la politique de Draghi laquelle consiste à détruire la monnaie, tout en maintenant la confiance qui permet de la détruire.

La politique de Draghi consiste maintenant à mettre le robinet monétaire au service des plus forts, comme outils de chantage. Ce qui est passé inaperçu, c’est le fait que les Allemands ont détourné les innovations de Draghi, alors qu’ils y étaient opposés. Ils les admettent et ils s’en servent pour imposer leurs vues sur ce que doit être l’Europe.

Bruno Bertez

Le Blog à Lupus

2 réflexions sur “La trahison de la Bundesbank. Par bruno Bertez

  1. Merci pour ce billet !
    Vous n’envisagez pas que tout cela puisse avoir d’autres raisons qu’une « foi en des dogmes ».
    N’étant pas croyant je pense à d’autres explications.

  2. Il y a une guerre féroce qui se livre entre les tenants d’une économie réelle saine portée par une politique monétaire intégrée et ceux qui utilisent la fausse monnaie pour financiariser le monde. Manifestement, le premier groupe est en perte de puissance et cède le pouvoir au deuxième….

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